ifa_MAG_156_bawü2014.jpg

S’il faut toujours procéder à une reconnaissance – l’engagement d’une équipe de reconnaissance n’est en revanche pas toujours nécessaire

Dans la phase initiale des interventions de défense incendie dans les installations souterraines de circulation (ISC), les effectifs sont souvent encore réduits. C'est pour cette raison que de nombreux participants aux cours nous demandent s'il y a un réel besoin d'engager une ou des équipes de reconnaissance. Notre réponse est: cela dépend de la situation. Les équipes de reconnaissance sont surtout nécessaires lorsque des informations importantes doivent être obtenues le plus rapidement possible.

Reconnaissance: recueillir les informations nécessaires


La reconnaissance consiste à récolter les informations nécessaires pour:

  • déterminer et évaluer la situation;
  • prendre des décisions sur cette base et
  • attribuer des missions ainsi que, finalement, pour
  • pouvoir en contrôler les effets.

Le choix des informations nécessaires, à quel moment, par qui et comment les obtenir dépend largement de la phase d’engagement qui est en cours. Au tout début de l’intervention, lorsque l'appel d'urgence est traité, le genre et le lieu de l'événement sont les deux éléments d'information les plus importants car, sans eux, il n'est pas possible de décider quelles forces d’intervention doivent être engagées et où. En règle générale, ces informations ne peuvent être obtenues que par l’intermédiaire des opérateurs de la centrale d’engagement.

Chacun doit constamment être en mode «Reconnaissance»


La reconnaissance est principalement considérée comme étant une tâche de la direction de l’intervention. En réalité, toutes les forces d’intervention doivent constamment recueillir les informations dont elles ont besoin pour mener à bien correctement leurs missions respectives dans le respect de leur propre sécurité. Exemple: pour éteindre efficacement un feu de véhicule dans un tunnel, l'équipe «Extinction» doit prendre un certain nombre de décisions. Il s'agit notamment de déterminer la distance et la position à adopter par rapport au véhicule en feu, de définir l'angle du jet, son débit et la tactique de refroidissement de l’infrastructure. Nombre de ces décisions sont prises de façon inconsciente et quasi automatique. S'il fait trop chaud pour le porte-lance, il n'a pas besoin de réfléchir longtemps à ce qu'il doit faire. Il augmente simplement la distance qui le sépare du feu. Il est à noter que toutes ces décisions sont basées sur des informations obtenues par le biais de perceptions et d'observations en association avec les connaissances et les expériences des personnes impliquées, raison pour laquelle l'équipe «Extinction» observera de façon ciblée ce qu'elle sait être dangereux, comme par exemple le plafond du tunnel et non pas la chaussée. La reconnaissance ne consiste donc pas à obtenir le plus d'informations possible, mais des informations pertinentes. Question: qu'est-ce qui est pertinent?

Mission permanente: identifier les dangers


Afin de pouvoir écarter les dangers de façon ciblée, ceux-ci doivent tout d'abord être identifiés comme tels. C'est pour cela que tous les intervenants doivent être conscients des indices et des signes de danger à chaque étape de l’intervention et, si nécessaire, transmettre ces informations à d'autres personnes. Si, dans un tunnel ferroviaire, les fumées commencent à stagner et ne se déplacent plus dans une certaine direction, cela peut indiquer que le sens du flux d’air commence à s'inverser, ce qui peut être extrêmement dangereux pour les intervenants et pour les passagers qui se trouvaient précédemment du côté de l’entrée de l’air. C'est pour cette raison que toute modification perceptible du flux d’air doit être immédiatement signalée aux forces d’intervention et transmise par celles-ci à tous les autres services susceptibles d'être impactés.

Le besoin d'informations résulte de la tactique


Au-delà de la mission permanente de l’identification des dangers, le besoin d'informations découle également de principes tactiques tels que «Eteindre pour sauver» applicables dans toutes les interventions de lutte contre le feu dans les tunnels. Dans des fumées denses, la recherche et le sauvetage prennent beaucoup de temps car les intervenants progressent lentement. C’est notamment pour cette raison que l’on ne procède pas en premier lieu aux sauvetages mais plutôt à l’extinction. En effet, dans un tel contexte, l'extinction doit être immédiatement entreprise afin d’interrompre la formation des fumées et d'améliorer ainsi les conditions de travail de l'équipe de recherche et de sauvetage en action du côté de la sortie de l’air. Cette procédure permet en effet de secourir plus rapidement les personnes qui pourraient s'y trouver.

Il en résulte des missions différentes d’un côté du tunnel et de l’autre: du côté de l’entrée de l’air, le feu doit être éteint alors que du côté de la sortie de l’air, l'équipe de recherche et de sauvetage doit rechercher et sauver. Par conséquent, en l’occurrence, l'information la plus importante est la direction du flux d’air, car sans ce renseignement, il est impossible de distinguer le côté de l’entrée de l’air du côté de la sortie de l’air. La deuxième information par ordre d’importance est la façon d'atteindre le plus rapidement possible l’endroit du sinistre; cette information requiert de déterminer l'emplacement exact du foyer. Une fois que la direction du flux d’air, la localisation du foyer et le moyen le plus rapide de l'atteindre ont été déterminés, la mission d’extinction peut être attribuée.

Du côté de la sortie de l’air, en revanche, l'information la plus importante est l’étendue des sauvetages à effectuer; pour cela, il faut déterminer le nombre et, si nécessaire, le type de véhicules pris dans les fumées. Le schéma ci-dessous montre deux exemples de l'importance des informations sur le flux de l'air, l'emplacement exact du foyer et l'accès le plus rapide à celui-ci. 

Comment et auprès de qui sont obtenues les informations?


Une autre question est de savoir comment et auprès de qui les informations requises sont recueillies. Les sources d'informations peuvent en effet être très différentes selon l’ouvrage concerné. La direction du flux d'air, la localisation du foyer et la situation du trafic peuvent parfois être communiquées, durant l’approche, par la centrale d’exploitation du tunnel ou peuvent être identifiés au moyen d’ enregistrements vidéo. Ou alors la direction de l’intervention elle-même peut apprécier la situation sur place et exploiter les informations provenant du portail opposé (par exemple afin de savoir si des fumées s’en échappent). Dans les tunnels ferroviaires, les mécaniciens des convois ferroviaires qui sont arrêtés devant le tunnel peuvent être une source précieuse d'informations et peuvent, par exemple, indiquer par où les personnes qui ont pratiqué l’autosauvetage sortent du tunnel.

Quand faut-il engager des équipes de reconnaissance?


Des équipes de reconnaissance sont nécessaires lorsque la direction de l’intervention ne peut pas obtenir suffisamment rapidement les informations nécessaires à l'évaluation de la situation, que ce soit par elle-même ou par l'intermédiaire d'une équipe Extinction ou d’une équipe Recherche et sauvetage. Le graphique ci-dessous montre deux exemples où la récolte d'informations peut être considérablement accélérée par l’engagement d'équipes de reconnaissance.

Ce qui est important, c’est la mission concrète de reconnaissance telle qu’attribuée


Les équipes de reconnaissance n'ont pas pour mission de tout explorer. Leur travail consiste à recueillir des informations spécifiques et ciblées. Pour cela, elles ont besoin de se voir attribuer une mission de reconnaissance concrète et aussi précise que possible de la part de la direction de l’intervention, comme par exemple «Déterminer l’étendue des sauvetages et les possibilités de passage dans les sections Q1 à Q2 du tunnel» ou «Déterminer l'emplacement exact du foyer dans le train».

Le fait d’attribuer une mission en disant simplement «Allez en reconnaissance!» n’est pas approprié car, dans ce cas, l'équipe de reconnaissance communiquera toutes ses observations, mais ne sera pas toujours en mesure de récolter et de fournir rapidement les informations nécessaires. C'est pour cette raison que les exemples de missions de reconnaissance mentionnés dans nos cours et dans nos documents de formation – par exemple «Déterminez l'emplacement exact du foyer!» – sont seulement des exemples et non pas des missions permanentes. Ainsi, l’emplacement du foyer ne doit pas être déterminé par l'équipe de reconnaissance s'il est déjà connu de la direction de l’intervention ou s’il peut être indiqué par d'autres intervenants.

Il n'y a donc pas de missions de reconnaissance permanentes ou «automatiques», à une exception près: ce qui suit s'applique non seulement à l’ensemble des intervenants mais également à l'équipe de reconnaissance: il faut toujours prêter attention aux dangers et les signaler.

La reconnaissance doit être préparée


C’est surtout durant la phase initiale que la direction de l’intervention est souvent submergée d'informations de toutes sortes. Si le chef d’intervention tente alors de vérifier la pertinence de ses propres observations ou des rapports qui lui sont fournis, il peut rapidement être débordé. Ainsi, au lieu de traiter toutes les informations, la direction de l’intervention doit se concentrer sur les informations qui sont réellement nécessaires à ce moment précis. Elle le fait en posant des questions spécifiques, par exemple à propos de l'emplacement exact du foyer.

Ces questions doivent être définies lors de la phase de préparation de l’intervention, d'autant plus qu'elles sont souvent spécifiques à un ouvrage donné. Un tunnel monotube sans accès latéraux pose des problèmes différents de ceux d'un tunnel bitube avec des liaisons transversales. Et il est à noter que, pour les interventions dans les tunnels ferroviaires, il faut obtenir beaucoup plus d'informations que pour celles effectuées dans les tunnels routiers, notamment afin de savoir si l’exploitation a été interrompue et si la ligne de contact a été mise hors tension et mise à terre. Des exemples et des modèles à ce sujet figurent dans la rubrique "Connaissances".

La reconnaissance doit être exercée


La reconnaissance est une mission très exigeante qui doit être exercée. La technique de simulation sur plans, que nous utilisons également dans nos cours de conduite, est parfaitement adaptée à cela. Dans ce cadre, des scénarios simples peuvent être utilisés pour apprendre à connaître les informations vraiment importantes et comment les récolter. L'interaction entre la direction de l’intervention et les équipes de reconnaissance doit également être entraînée. Nous savons, grâce à notre expérience dans le domaine de la formation, qu'il n'est pas facile de formuler des missions de reconnaissance concrètes de façon précise et sans ambiguïté… ni d’ailleurs de les exécuter ensuite correctement. Par exemple, il faut un peu de pratique avant que les membres des équipes de reconnaissance sachent précisément ce que signifie «Déterminer les possibilités de passage».

La reconnaissance est l'acquisition ciblée d'informations pertinentes


Effectuer une reconnaissance, c'est bien plus que juste «aller jeter un coup d’œil pour voir ce qui se passe». La reconnaissance, c’est l'acquisition ciblée d'informations qui sont pertinentes et nécessaires à un moment donné. Dans ce but, la direction de l’intervention peut exploiter de nombreuses sources d'informations. Pour savoir si des fumées s'échappent du portail opposé, il n'est clairement pas nécessaire d’engager une équipe de reconnaissance: une demande adressée aux collègues qui se trouvent de l’autre côté de l’ouvrage suffit. Les équipes de reconnaissance ne doivent être engagées que si les informations recherchées ne peuvent être obtenues assez rapidement par d'autres moyens. Leur engagement peut alors s’avérer extrêmement précieux.

IFA
IFA
Votre interlocuteur direct

Marianne Wernli

Responsable Formation

Responsable Formation Marianne Wernli